Sujets corrigés ENAM Cameroun Droit des affaires 1 Section judiciaire Magistrature
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Sujets corrigés ENAM Cameroun
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SUJET:
« Chèque sans provision ».
Corrigés:
La réglementation des moyens de paiement, parmi lesquels le chèque, a donné naissance au fil du temps à divers textes juridiques. Nous pouvons citer entre autres, le décret-loi du 30 octobre 1935, et ses modifications subséquentes, la loi n° 90-061 du 19 décembre 1990 portant modification de certaines dispositions du Code pénal camerounais, et le règlement n° 02/03/CEMAC/UMAC/CM, du 04 avril 2003 relatif aux systèmes, moyens et incidents de paiement. Le Code pénal camerounais (CPC) situe le délit de chèque sans provision dans le Titre II, du deuxième Livre relatif aux crimes et délits contre l’intérêt général, notamment dans le Chapitre III, consacré aux atteintes à l’économie publique. kamerpower.com
Une meilleure compréhension de cette étude impose la clarification préalable du concept de « chèque sans provision ». C’est ainsi que cette notion est définie dans le lexique des termes juridiques comme : « un chèque soit émis sans provision préalable, soit privé de toute ou partie de sa provision après émission, soit frappé d’opposition à paiement ». C’est dans ce sens que se situe l’article 253 CPC, lorsqu’il dispose : « Est puni des peines prévues à l’article 318, celui qui:
a) émet un chèque sur une banque ou un compte postal, même étrangers, sans provision préalable et disponible, ou sans provision suffisante;
b) après émission, même à l’étranger, retire toute ou partie de provision ou fait défense au tiré de payer ». (Sujets corrigés ENAM Cameroun)
Il ressort de cette définition que le délit de chèque sans provision peut être commis quelle que soit la situation nationale ou étrangère du compte.
En érigeant ce comportement en infraction, le législateur camerounais se soucie de la protection de l’économie publique, via le patrimoine des particuliers.
Toutefois, même si la victime du délit de chèque sans provision n’est pas consciente de sa situation de victime au moment où l’infraction se commet, il ne faudrait pas confondre ce délit à ce de la filouterie ou de l’escroquerie.
En effet, le chèque sans provision et la filouterie se distinguent d’abord par la valeur sociale protégée. La première protège l’économie publique, alors que la seconde veille sur les biens des particuliers. Par ailleurs, même si les deux infractions sont de la compétence du juge correctionnel, le chèque sans provision est sévèrement plus puni
que la filouterie. Enfin, le délit de chèque sans provision peut couvrir celui de la filouterie, dans la mesure où le filou peut régler sa note par un chèque, qui peut ultérieurement se révéler sans provision.
Quant à l’escroquerie, elle se rapproche du chèque sans provision par la sanction, les deux délits étant punis des peines prévues à l’article 318 du Code pénal camerounais. Si en définitive le délit de chèque sans provision est différent de la filouterie et de l’escroquerie, il importe de connaître avec précision sa particularité. En clair, comment
faut-il comprendre ce délit ? Mieux, dans quelles circonstances cette infraction est-elle consommée, et quelles sont les règles juridiques applicables ? (Sujets corrigés ENAM Cameroun)
Avant de répondre à cette interrogation, il est judicieux de relever que le thème soumis à notre analyse suscite un triple intérêt scientifique, économique et social.
Sur le plan scientifique, cette étude met en relief la nécessité d’actualiser, voire adapter le Code pénal camerounais aux instruments juridiques camerounais et internationaux.
Sur le plan économique, il faut relever la valeur montante du chèque, qui : « n’est pas un instrument de crédit, mais un titre de paiement »: et la nécessité de protéger au maximum le bénéficiaire du chèque.
Sur le plan social, l’émission de chèques sans provision peut entraîner une chaîne d’insolvabilité pouvant être similaire à la « crise des softprimes », vécue actuellement aux Etats-Unis d’Amérique du Nord. (Sujets corrigés ENAM Cameroun)
D’une manière générale, la compréhension du délit de chèque sans provision s’apprécie par sa répression (II) et ses déterminants (I).
I. La consommation du délit de chèque sans provision
Comme toutes les infractions, l’infraction de chèque sans provision possède des éléments lui permettant d’être différentiée des autres. Lesquels sont regroupés, en sus de la condition préalable (l’existence d’un compte), en élément moral (A) et en éléments matériels (B).
A. Le particularisme de l’élément psychologique dans le délit de chèque sans provision
Le particularisme ici met au devant des analyses le principe édicté par les articles 74 du Code pénal camerounais et 237 du Règlement communautaire, à savoir l’existence d’une intention coupable (I), et l’absence de ladite intention n’excluant pas la responsabilité du tireur énoncé par la jurisprudence (2).
1. La nécessité d’une intention coupable
L’article 74, paragraphe II du Code pénal camerounais dispose : « Est pénalement responsable celui qui, volontairement, commet les faits caractérisant les éléments constitutifs d’une infraction avec l’intention que ces faits aient pour conséquence la réalisation de l’infraction ». De l’analyse faite de cet article, il ressort que le tireur tombe
sous le coup du délit de chèque sans provision, lorsqu’il émet un chèque tout en sachant que le bénéficiaire ne sera pas satisfait. En d’autres termes, sa mauvaise foi doit être caractérisée. (Sujets corrigés ENAM Cameroun: kamerpower.com)
De même, l’article 237 du Règlement n° 02/03/CEMAC/UMAC/CM relatif aux systèmes, moyens et incidents de paiement disposant que : Est puni d’un emprisonnement (…), toute personne qui, avec l’intention de porter atteinte aux droits d’autrui, émet un chèque sans provision », fait également ressortir la nécessité de l’existence d’une intention coupable, caractéristique de la mauvaise foi du tireur. Ainsi donc, la simple connaissance de l’absence de provision est constitutive de mauvaise foi au sens de l’article 253 du Code pénal camerounais. Ce qui implique de la part du tireur l’intention et la volonté de réaliser l’infraction. Nous pouvons citer à cet effet l’arrêt n° 39/Pdu 18 novembre 1976 et les jugements n° 176317/CORdu 03 février 2006 opposant Aboudi Ebodé Jean Baptiste et Eloundou Dagobert Simplice, et n° 3779/CORdu 30 juin 2006.
De même, la complicité du bénéficiaire avec le tireur n’exonère pas ce dernier de sa responsabilité pénale. C’est-à-dire le fait pour le bénéficiaire de connaître que le chèque à lui émis par le tireur est sans valeur, parce que la provision n’y est pas préalable et disponible ou est insuffisante n’efface rien le délit de chèque sans provision
et partant la responsabilité pénale du tireur. Cf. Arrêt n° 34 du 12 novembre 1968, affaire Kadji Joseph c/ Soubmi Ahmed, et Arrêt n° 84 du 19 janvier 1971, affaire Youbou Lucas C/ M. P. et Ngonsang Jean.
Si l’existence d’une intention coupable tel que vu ci-dessus par les articles 74, paragraphe II du Code pénal camerounais et 237 du Règlement communautaire est le fondement de la responsabilité du tireur, qu’en est-il de son absence ?
2. L’absence d’intention coupable : une cause non exclusive de responsabilité pénale
Si la loi exige une intention coupable, la jurisprudence et la doctrine vont plus loin en admettant que le fait de ne pas vérifier le solde de son compte lors de l’émission du chèque caractérise la mauvaise foi du tireur. Ainsi, le tireur a une obligation de vérification de son compte avant l’émission de tout chèque, faute de quoi il tombe sous le coup de chèque sans provision. Autrement dit, le tireur ne pourra pas se prévaloir de sa passivité pour voir sa responsabilité exclue, car il est tenu de vérifier son solde avant toute émission de chèque. Il en résulte donc que l’absence d’intention délictuelle n’exonère pas le tireur de sa responsabilité pénale. Voir à cet effet, en ce qui concerne la
jurisprudence, C.S.C.O Arrêt n° 147/P du 24 mars 1970 et C.S. Arrêt n° 315/P du 14 août 1975, Bull. n° 33, p. 4840. C’est dans la même logique que M. Gilbert Schlick, actuellement Président du Tribunal de Grande Instance de Yaoundé, avait déclaré : « C’est à tort. Quand vous émettez un chèque, vous devez prendre toutes les précautions
et donc être sûr que la provision existe ». (Sujets corrigés ENAM Cameroun: kamerpower.com)
En plus de l’élément psychologique, ledit chèque sans provision fait également ressortir plusieurs éléments matériels.
B. Les manifestations des éléments matériels
La lecture combinée des articles 253 du Code pénal camerounais, 237 et 238 du Règlement communautaire montre que les éléments matériels constitutifs du délit de chèque sans provision s’analysent sous un double angle. Dans un premier temps, le tireur ne pose aucun acte après émission du chèque (insolvabilité passive) (1) ; dans un second temps, le tireur agit auprès de son banquier après que le chèque a été émis (insolvabilité active) (2).
1. L’insolvabilité passive
Une interprétation littérale de l’alinéa (a) de l’article 253 du Code pénal camerounais montre que deux faits sont constitutifs d’éléments matériels du délit de chèque sans provision. Ainsi, l’infraction est commise lorsque le compte du prévenu est, soit sans provision préalable (a), soit sans provision suffisante (b). Cette vue restrictive des éléments matériels de l’insolvabilité passive semble être corrigée par le Règlement CEMAC qui innove en ajoutant d’autres éléments matériels (c). (Sujets corrigés ENAM Cameroun: kamerpower.com)
a) L’absence de provision
En principe, l’existence d’une provision dans le compte du prévenu doit être antérieure à l’émission du chèque. On parle alors d’une absence de provision préalable et disponible lorsqu’à l’instant où le tireur émet le chèque, son compte est sans provision. Il en est ainsi lorsque le tireur émet le chèque tout en sachant que le solde de son compte
est négatif. De même, bien que conscient de cet état, le tireur émet le chèque en espérant que l’argent y serait versé avant la présentation du chèque pour le paiement (Crim. 10 juin 1958, B. 447 R. 1959, p. 114, obs. Bouzard).
Par ailleurs, il arrive aussi que le tireur émette un chèque alors qu’il sait pertinemment qu’il n’a pas de compte bancaire ou postal (C.S. Arrêt n° 314/P du 14 août 1975, Bull. n° 33, p. 4838). Toutefois, cette jurisprudence n’emporte pas notre adhésion dans la mesure où la condition préalable du délit de chèque sans provision est l’existence d’un compte.
Au-delà de ce qui précède, il peut aussi arrivé qu’un compte ait une provision préalable et disponible, mais insuffisante.
b) L’insuffisance de la provision
Le délit de chèque sans provision se commet également lorsque la provision, bien qu’étant préalable et disponible, reste inférieure à la somme sollicitée par le tireur. « En d’autres termes, le paiement ne peut être effectué en totalité».
c) Les innovations du Règlement communautaire
Dans certains cas, le compte peut effectivement avoir une provision préalable au moment de l’émission du chèque. Seulement, lorsque le bénéficiaire se rend à la caisse, il n’est pas satisfait. On parle dans ce cas d’un compte à la provision préalable mais indisponible.
D’une manière générale, l’indisponibilité du compte peut être le fait de la banque, ou des tiers qui sont en relation d’affaire avec le tireur. (Sujets corrigés ENAM Cameroun: kamerpower.com)
Ainsi, le Règlement communautaire en son article 238 fait allusion au chèque sans provision contre « toute personne qui tire un chèque au mépris d’une interdiction bancaire ou judiciaire qui lui a été notifiée ; (…) ».
Par ailleurs, la provision peut être rendue indisponible parce que le compte du tireur subit une action oblique ou paulienne de l’un de ses créanciers.
L’absence de provision préalable et disponible ou insuffisante ne sont pas les seuls faits matériels constitutifs du délit de chèque sans provision. Ce délit est consommé même lorsque le prévenu organise sa propre insolvabilité.
2. L’insolvabilité active du tireur
Le tireur peut porter atteinte aux droits d’autrui en retirant (a) ou en bloquant (b) la provision de son compte. (Sujets corrigés ENAM Cameroun: kamerpower.com)
a) Le retrait de la provision
Cette hypothèse se réalise lorsque, après avoir émis un chèque, le tireur précède le porteur à l’établissement financier et retire toute ou partie de la provision. Laquelle devient alors inexistante ou insuffisante. Or en principe, la remise du chèque vaut paiement, si bien que la provision est transférée au bénéficiaire dès l’émission du chèque, et le tireur ne peut plus en disposer (C.S.O.C. Arrêt n° 122/P, du 15 février 1972, Bull. n° 26, p. 3365 ; Arrêt n° 147/P, du 24 mars 1970, Bull. n° 22, p. 2645).
b) La défense faite a tiré de payer (« blocage »)
En réalité, le titulaire du compte ne peut mettre en mouvement cette défense que s’il y a eu perte ou encore s’il craint une utilisation frauduleuse du chèque. Le titulaire du compte peut également défendre au tiré de payer lorsque le porteur est sous le coup d’une procédure judiciaire ou de liquidation des biens. (Sujets corrigés ENAM Cameroun: kamerpower.com)
En dehors de ces hypothèses, le banquier doit informer, par écrit, le titulaire du compte des sanctions encourues en cas de blocage non justifié.
Après examen des éléments constitutifs du délit de chèque sans provision, il convient d’examiner le régime de sa répression.
II. La répression du délit de chèque sans provision
Nous envisagerons la répression ici au sens large, c’est-à-dire toute mesure justifiée par l’émission de chèque sans provision, et qui constitue une gêne pour le coupable de l’infraction. En d’autres termes, cette mesure peut être pénale ou non. Ce qui emporte une dualité de procédure, relevant diverses sanctions. Aussi examinerons-nous les procédures appliquées (A) et le régime des peines (B).
A. Les procédures appliquées
De l’interprétation du règlement relatif aux systèmes, moyens et incidents de paiement, il ressort qu’en matière de chèque sans provision, on a une procédure non contentieuse, se déroulant hors des tribunaux (1), et une procédure contentieuse faisant intervenir le juge pénal (2). (Sujets corrigés ENAM Cameroun: kamerpower.com)
1. La procédure non contentieuse
Lorsque le porteur du chèque se présente chez le tiré pour paiement et qu’il n’obtient pas satisfaction en raison de l’établissement des éléments constitutifs sus décrits, le tiré lui délivre un certificat de non paiement. Ce certificat a pour but de constater officiellement le non paiement du chèque, et permet à l’huissier ou au notaire de délivrer un titre exécutoire, rendant possible toutes les formes de saisie. Ce titre exécutoire est le protêt, réglementé dans le Chapitre X de la deuxième partie du règlement CEMAC, intitulée : “Moyens de paiement”.
Le règlement n’a pas défini la notion de “ protêt”. Nous référant au Lexique des termes juridiques, le protêt est un acte authentique dressé par un huissier ou un notaire à la dd du porteur d’un effet de commerce, ou constater officiellement soit le non paiement à l’échéance de l’effet (le protêt faute de paiement), soit le refus d’acceptation d’une traite par le tiré (protêt faute d’acceptation).
Il faut relever que la délivrance de ce certificat n’intervient que lorsque le tireur n’a pas régularisé l’incident de paiement. (Sujets corrigés ENAM Cameroun: kamerpower.com)
Ce certificat est notifié ou signifié au tireur (ce qui vaut sommation de payer) qui dispose de quinze jours dès réception de la notification ou signification pour s’acquitter de sa dette ; sinon l’huissier constate le non paiement et en dresse certificat, qu’il permette au greffier en chef de la juridiction compétente ou l’autorité judiciaire, aux fins
d’apposition de la formule exécutoire. Cette formule permet de procéder à toute voie d’exécution dans un délai de huit jours.
Par ailleurs, l’émission de chèque sans provision peut donner lieu à un prononcé d’une interdiction bancaire d’émettre des chèques, ainsi que de se faire délivrer des cartes de paiement (article 196). Cette interdiction constitue à notre avis une sanction à l’encontre du tireur coupable, qui ne sera levée que si le tireur justifie s’être acquitté du
montant du chèque, ou avoir constitué au compte une provision suffisante, disponible et affecté au règlement dudit chèque par le tiré (article 198).
2. La procédure contentieuse
Le porteur d’un chèque sans provision resté insatisfait après sommation de payer du tireur peut saisir le tribunal de première instance compétent, afin que le juge puisse statuer sur sa cause. (Sujets corrigés ENAM Cameroun: kamerpower.com)
La procédure obligatoire en matière de chèque sans provision est celle de flagrant délit, car les affaires de chèque sans provision : « constituent une catégorie d’affaire qualifiée de simple et doit être réglée très rapidement ».
Ainsi, dès la première audience, si le paiement produit l’original du chèque qui constitue le corps du délit dans ce type d’affaire et sans lequel il ne peut être statué au fond, le dossier est déjà retenable et la décision peut être rendue à cette audience si le prévenu ne sollicite pas un renvoi pour préparer sa défense.
Les audiences sont publiques, de même que les débats qui se déroule suivant le principe du contradictoire.
Si la célérité caractérise la procédure de chèque sans provision, qu’en est-il exactement des peines dans cette matière?
B. Le régime des peines
Si le délit de chèque sans provision a été dépénalisé en France dans son premier alinéa, au Cameroun, cette infraction continue d’être sanctionnée entièrement. Les raisons de la dépénalisation en France ne se vérifiant certainement pas au Cameroun. Nous examinerons les peines encourues (1) au regard du Code pénal camerounais
et du Règlement CEMAC, et celles appliquées (2). (Sujets corrigés ENAM Cameroun: kamerpower.com)
1. Les peines encourues
Une meilleure analyse de cette partie impose l’examen des personnes susceptibles d’être sanctionnées (a) et les peines prévues par le législateur (b).
a) Les personnes condamnables
Le délit de chèque sans provision fait intervenir plusieurs acteurs à savoir : le tireur, le tiré, le porteur, le mandataire, l’aval. Mais seuls le tireur et le porteur retiennent notre attention en raison des débats qu’ils suscitent quant à leur responsabilité pénale.
S’il est admis que la responsabilité pénale du tireur est établie avec ou sans intention délictueuse, cela étant une question de fait réservée à l’appréciation souveraine des juges du fond, et qui n’échappe plus au contrôle de la Cour suprême (C.S. Arrêt n° 115, 08 février 1979, Bull. n° 40, p. 5980 ; jugement n° 3779/COR du 30 juin 2006).
En outre, la connaissance du défaut de provision bancaire par le bénéficiaire au moment de l’émission du chèque n’est pas une cause exonératoire de responsabilité du tireur. Ce qui se réalise généralement dans le cadre de chèque de garantie crée une polémique sur la responsabilité du bénéficiaire du chèque. (Sujets corrigés ENAM Cameroun: kamerpower.com)
En effet, une lecture et un commentaire combiné des articles 97 et 253 du Code pénal camerounais devrait en principe aboutir à la condamnation du bénéficiaire du chèque, aux mêmes peines que le tireur, lorsque celui-là avait connaissance du défaut de provision du chèque, mais l’a tout de même accepté. Car en ce moment, il se rend
complice du délit de chèque sans provision. Mais le presque totalité des jurisprudences ne condamnent pas le bénéficiaire à une peine, se limitant seulement, le cas échéant, à rejeter sa dd en réparation pour irrecevabilité en vertu de l’adage nemo auditur (C.S.C.O. Arrêt n° 34 du 12 novembre 1968). Elles ne retiennent que la culpabilité du prévenu. Ainsi, la Cour suprême, dans l’arrêt n° 84 du 19 janvier 1977, déclare : « Attendu dans ces conditions que le demandeur ayant accepté sciemment un chèque postdaté et sans provision disponible, c’est à bon droit que la Chambre correctionnelle de la C.A. de Douala, après avoir retenu la culpabilité du prévenu, a déclaré irrecevable l’action en paiement du montant du chèque litigieux au profit du bénéficiaire ».
Mais l’on peut peut-être comprendre pareille attitude par le simple fait que le bénéficiaire est complice, mais un « complice victime ».
Les points de vue de la doctrine sur ces chèques de garantie divergent. Interrogé sur la question, M. Gilbert Schlick déclare que certains ne voient pas d’infraction dans le fait que le chèque ait été accepté en connaissance de défaut de provision, sans que soit acquise l’intention de porter atteinte aux droits d’autrui. Et s’il n’y a pas d’infraction, personne n’est donc condamné. (Sujets corrigés ENAM Cameroun: kamerpower.com)
D’autres par contre, dit-il, estime que le tireur et le bénéficiaire doivent être sanctionnés.
En définitive, sur cette question de la culpabilité ou non du bénéficiaire, le Règlement CEMAC vient mettre fin au débat, lorsqu’il punit expressément des mêmes peines qu’à l’article 238 : « toute personne qui accepte en connaissance de cause un chèque sans provision ». Et si ce règlement est texte supérieur au Code pénal camerounais, les juges devraient s’aligner, et le Code pénal camerounais actualisé.
b) Les peines prévues par le législateur
Le Code pénal camerounais, pour la répression du délit de chèque sans provision, renvoie aux peines prévues à l’article 318 du même code. Il s’agit d’un emprisonnement de cinq à dix ans et d’une amende de 100 000 à 1 000 000 de francs CFA, et le cas échéant, des déchéances de l’article 30 du Code pénal camerounais, qui sont des peines
accessoires.
Le règlement communautaire quant à lui punit ce délit d’un emprisonnement de six mois à cinq ans et d’une amende de 100 000 à 2 000 000 de francs CFA, ou l’une de ces deux peines seulement dans ses articles 237 et 238.
A la lecture de ces articles, on relève que le règlement communautaire est plus souple dans la répression du délit de chèque sans provision, car il donne la possibilité au juge de choisir soit l’emprisonnement, soit l’amende ; plus encore, son quantum de peine est faible, contrairement au Code pénal camerounais très rigide et désuet. (Sujets corrigés ENAM Cameroun: kamerpower.com)
Mais dans la pratique, la majorité des juges préfère la répression du règlement communautaire.
2. Les peines appliquées : la liberté totale d’appréciation du juge
Dans le choix concret de la peine qu’il prononcera contre tel délinquant, le juge dispose de pouvoirs extrêmes. S’il entend faire preuve d’indulgence, le juge peut descendre même en deçà des minima prévus par le texte incriminateur. S’il entend faire preuve de sévérité, il peut condamner à plusieurs des peines prévues par le texte
incriminateur.
Pour tout dire, l’individualisation de la peine est le crédo du juge et ne fait que confirmer l’objectif poursuivi par la politique criminelle actuelle qui tend plus à corriger le délinquant en vue de sa réinsertion sociale qu’à le punir. Cela peut être illustré par les jugements de la Section “Correction” du TPI centre administratif suscité, qui consacre chacun pour les circonstances atténuantes.
Conclusion
Au terme de notre analyse, le délit de chèque sans provision apparaît comme une infraction assez complète et riche du point de vue du Droit pénal spécial, tant elle renferme tous les éléments constitutifs, à savoir la condition préalable, l’élément moral et les éléments matériels qui permettent de soulever les hypothèses exceptionnelles qui
confirment les principes ordinairement connus.
Sa procédure et sa répression attestent de l’importance économique du chèque, de la célérité et du souci de sécuriser le monde des affaires, afin de favoriser le développement économique des Etats. (Sujets corrigés ENAM Cameroun kamerpower.com)
Si en France cette infraction a été dépénalisée pour certainement des raisons propres à la société française, elle demeure au Cameroun une infraction prévue et réprimé par tant le Code pénal camerounais que le règlement communautaire, situation louable à notre avis, compte tenu des spécificités africaines en général, et en particulier
celles du Cameroun. Et ce d’autant plus que le chèque devient de plus en plus le moyen de paiement le plus utilisé, surtout dans le domaine des affaires.
Il est certes vrai que l’article 253 du Code pénal camerounais est rigoureux dans la répression et très limité à propos des éléments matériels du délit de chèque sans provision. Mais, ces lacunes sont corrigées par l’article 93 Code pénal camerounais et le règlement communautaire. Mais seulement, si les juges camerounais tendent plus vers la souplesse, telle que prévue par le Règlement CEMAC, ne devraient-ils pas réprimer également le bénéficiaire complice pour éviter le système de deux poids deux mesures ?
Par ailleurs, l’insolvabilité active ne devrait-elle pas être sanctionnée plus sévèrement que l’insolvabilité passive?